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Culture

Lázaro Sosa, promoteur du développement durable

L'atelier Libre Imagen, arte y conservación : un projet communautaire écoresponsable

Auteur:
Mayasil Morales Perez
Date de publication / actualisation:
30 septembre 2024

Lázaro Ramón Sosa Moreno est le fondateur de l'atelier Libre Imagen, Arte y conservación. Un projet communautaire ayant pour ambition d'initier les communautés de la Ciénaga de Zapata au développement durable tout en promouvant l'écotourisme. L'objectif principal de cet atelier étant la sauvegarde des valeurs historiques, culturelles et naturelles de la région.

À la demande de l'équipe de Cubanía, Lázaro Sosa s'est rendu à la rédaction du magazine et a accepté de parler des origines et des transformations de l'atelier Libre Imagen, Arte y Conservación (Libre Image, Art et Conservation).

Des rêves à la réalité du terrain

Lázaro est diplômé de l'école des Instructeurs d'Art de Camagüey, sa province natale. Durant ses études de théâtre, il rencontre Susana Guevara Barrero, son épouse, qui étudie les arts plastiques dans le même établissement scolaire. À partir de ce moment-là, ensemble et avec amour, naît en eux le rêve d’un projet commun. Ils sont arrivés il y a plus de 15 ans à la Ciénaga de Zapata avec l'idée de créer une compagnie de théâtre pour enfants. À cette époque, l'ensemble Artistique Communautaire de Korimakao, une institution très performante et consolidée dans la région, servait de modèle et de guide à leur travail.

Lorsque Lázaro et Susana sont arrivés à la Ciénaga de Zapata leur projet était bien différent de l'actuel atelier. L'influence de la communauté, de son environnement et de ses réalités l'a fait évoluer. La transformation s'amorce vers une approche plus environnementale et socialement responsable, jusqu'à finalement devenir un projet de développement local. Au départ, ils se joignent aux travaux de nettoyage et d'assainissement de la côte, puis dans un second temps ils commencent à proposer des activités de formation et de gestion en matière de tourisme rural durable et de développement local. L'atelier réalise finalement des panneaux et des affiches informatives, à utiliser dans les zones protégées, et travaille avec les espèces sylvestres envahissantes qui mettent en danger l'écosystème de cette réserve naturelle. Les arts plastiques sont également un élément essentiel de l'atelier.

Enfin, conformément aux stratégies gouvernementales de développement communautaire et en accord avec ses lignes directrices, Lázaro et Susana se sont focalisé sur la production alimentaire et le reboisement de la zone côtière avec des espèces des zones humides, telles que le manglier et le raisinier bord de mer. En plus de ces actions, ils ont également réalisé des travaux de jardinage, d'horticulture et d'aménagement paysager.

Un tourisme en pleine expansion

C'est grâce à son poste à l'Université de Matanzas, comme responsable des projets de développement local, que Lázaro tente de relier la recherche à la réalité des Cenagueros. La Ciénaga de Zapata est devenu le site par excellence à Cuba des projets de développement du tourisme durable. Ils y sont en effet, bien accueillis et ils y obtiennent également d'excellents résultats. Ces activités sont menées dans la Ciénaga depuis bien avant leur arrivée, mais elles n'avaient pas été formalisées à travers des projets tels que ceux menés à l'atelier Libre Imagen, Arte y conservación. Dans d'autres régions, comme Pinar del Rio, des recherches universitaires ont été réalisées à ce sujet, mais d'après Lázaro Sosa, les recherches en cours sont trop académiques. Les connaissances acquises à la Ciénaga de Zapata sont plus empiriques.

Cenaguero: Ce terme fait référence aux habitants de la Ciénaga de Zapata, la plus grande zone humide des Caraïbes.

L'un des défis du projet a été de rechercher parmi les résidents ceux qui connaissent bien la région, pour offrir le meilleur service de guides locaux. Il n'y a rien de mieux qu'une visite de cette zone protégée guidée par un local car personne ne connaît l'endroit mieux qu'eux. Cela favorise le développement de la communauté et génère de nouveaux emplois, notamment pour les femmes.

Visiter la Ciénaga durant la saison des pluies ou la saison sèche sont deux expériences complètement différentes. « Je vais y vivre encore 20 ans et cela me surprendra toujours, assure-t-il. Je ne pense pas que je vais comprendre leur façon de communiquer avec les animaux ou aux plantes. » C’est la singularité du Cenaguero, une particularité qui change selon les communautés paysannes qui le composent. Fort de son expérience, il estime que l’urbanisation de Cayo Ramona et Girón n'a pas eu un impact positif. Les constructions modernes ont modifié l'environnement et le paysage, créant un déséquilibre dans l'harmonie du lieu. Il confesse qu'il préfère vivre dans de petites communautés paysannes plus paisibles telles que Soplillar ou Los Hondones.

Ce qui a été fait jusqu’à présent à la Ciénaga est une bonne chose, mais nous devons redoubler d’efforts pour l’améliorer. L'expérience qui existe avec le tourisme français devrait servir de base pour poursuivre le développement de la région...

La Ciénaga en voie de développement ?

La menuiserie est l'une des activités proposées par l'atelier. Sont utilisées principalement des espèces de bois envahissantes, nuisibles à cet écosystème. Telles que l'acacia Saint-Domingue (Dichrostachys cinerea) et le cajeput (Melaleuca leucadendra). D'après Lázaro le projet a survécu au temps du COVID grâce à ces plantes. « Ce sont des bois difficiles à extraire de la forêt, en raison de leur poids et de leurs dimensions. Il est difficile de les travailler en raison de leur dureté, mais en même temps cela les rend très résistant aux parasites, explique Lázaro. » Il assure également que ce sont ces mêmes caractéristiques qui rendent ces œuvres plus durables et leur ajoutent de la valeur.

Il est difficile de trouver un espace pour faire de la menuiserie et de déplacer le bois. Le plus simple pour lui et son équipe est de se rendre directement dans les lieux qui louent ses services et garantissent les matières premières. C’est ainsi qu’ils ont eu l'opportunité de travailler dans différentes zones protégées. Ils enseignent d’abord dans leur atelier la conception et la création de panneaux et d'affiches informatives, puis le réalisent sur place. Une fois l'objet terminé, ils ont non seulement achevé les travaux mais ont également formé les personnes chargées de son entretien et de sa conservation. Ils ont eu plusieurs expériences positives dans des zones telles que Viñales, Banao ou La Gran Piedra.

Le recyclage au cœur du projet

En plus des panneaux et des affiches d'information, au sein de l'atelier sont réalisées de petites peintures avec comme principal thème les oiseaux endémiques. Ces oiseaux peuvent être observés notamment, lors des visites des sentiers du parc naturel de la Ciénaga de Zapata. Susana Guevara Barrero, est l'artiste chargée de les réaliser, elle utilise entre autres, la technique de la pyrogravure. Les restes de bois sont la base de la création de ces œuvres mais également des autres objets artisanaux qui sont proposés à la vente dans leurs expositions.

« Les visiteurs de l'atelier veulent toujours ramener chez eux un souvenir, explique Lázaro. Le travail n'est pas facile et dépend du bois utilisé, certains nécessitent un bon séchage car ils sont consommés au cours du processus, d'autres sont très difficiles à sculpter. Chaque petit tableau est une pièce unique ». Une partie des bénéfices obtenus est utilisée pour développer et améliorer la qualité de vie de la communauté elle-même.

Dans leur stratégie de travail, rien ne se perd et tout se réutilise. Si les restes de bois sont recyclés comme nous venons de le voir, que font-ils de la sciure de bois produite lors du processus de création ? « Elle devient de la terre, explique Lázaro en souriant ». Elle sert à créer un substrat pour remplir le sol rocheux et pouvoir y faire pousser des cultures. Ainsi ils plantent, dans leur modeste verger, tout ce qu'ils consomment de manière naturelle et écologique. Il produit des bananes, des citrons, des fruits de la passion, des pommes à sucre, des avocats, des mangues, des piments, tous récoltés là-bas.

Il y a très peu d'espaces avec de la terre assez ferme pour être cultivée, ainsi avec les déchets de bois, nous faisons de la terre et en remplissons le sol rocheux.

Lors de son entretien avec l'équipe de Cubanía, la fierté et l'attachement de Lázaro pour cette terre, qui l'a accueilli il y a plus de dix ans et dont il se sent partie intégrante, sont évidentes. Si sa région d'origine lui manque, il ne le dit pas. Il pense déjà comme un Cenaguero et désir la prospérité des communautés de la Ciénaga. Il sait que la vie là-bas a toujours été difficile en raison des conditions défavorables mais grâce à sa modeste contribution, il aspire à les inverser.

traducteur:

Elodie Vandenbossche

Cubanía

Cubanía s’efforce de retranscrire, que ce soit par l’image, le son, ou l’écrit, la vie quotidienne de La Havane et de Cuba à un public hétéroclite, curieux, intéressé, souvent non résidents. Toujours en dehors des grands débats politiques, économiques ou des thèmes couramment traités par les médias officiels, Cubanía souhaite au contraire faire témoigner les Cubains de tous les jours, la société dans son organisation actuelle, à travers des lieux, des traditions, des expressions culturelles parfois méconnues.

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