Korimakao : une révolution artistique à la Ciénaga de Zapata
L'ensemble artistique communautaire Korimakao ou l'art à portée de tous
Korimakao est un groupe artistique formé par des jeunes de tout le pays. Il a ses quartiers généraux dans la Ciénaga de Zapata, le territoire le plus étendu du pays, mais aussi le moins peuplé.
Korimakao a été fondé en 1992, en pleine Période spéciale, à l’initiative du commandant Faustino Pérez et de l'acteur Manuel Porto, qui a travaillé au cinéma, à la radio, au théâtre et à la télévision. L'histoire de cette initiative est jalonnée de vicissitudes. En pleine crise économique des années 90, ce projet semble être une véritable chimère. Cependant, les deux fondateurs sont convaincus qu’il est tout aussi important de donner à manger à la population que d'alimenter son esprit.
C'est ainsi que naît le projet artistique expérimental Ciénaga de Zapata, devenu plus tard l’ensemble artistique communautaire Korimakao.
Un projet utopique ?
Le premier grand défi : trouver dans les villages de la Ciénaga des personnes ayant le goût du théâtre, de la musique et de la danse, afin de former des groupes avec l’aide d’instructeurs d’art venus de Jagüey Grande. En effet, à ce moment-là, personne sur place ne compte sur la formation nécessaire pour assumer cette tâche.
Une fois franchi ce premier pas, il fallait donner un nom au groupe. Un vocable d’origine indigène répondant à l’essence du groupe est retenu : Korimakao. D'origine arahuaca, c'est le terme employé par d'autres aborigènes pour désigner les habitants de la Ciénaga, qui étaient des nomades, des cueilleurs, des chasseurs et des pêcheurs.
Ainsi, kori, qui signifie homme, et macao, nom de l’arthropode qui se réfugie dans les coquilles de certains mollusques, s’unissent pour former Korimacao, à savoir hommes qui portent leur maison sur leur dos. C’est précisément ce qui distingue ce groupe artistique : il porte l’art sur son dos et le partage avec le public.
Cet ensemble artistique révolutionne cette province peu dynamique et à faible densité de population. Il cultive un art expérimental et communautaire destiné à renforcer l’identité et les valeurs culturelles des habitants de la région. Depuis la fondation de Korimakao jusqu’à nos jours, plus de cinq cents jeunes ont pris part à ce projet.
La Ciénaga : la métamorphose
Dès sa création, le groupe recrute de jeunes habitants de la Ciénaga, un fait insolite dans le pays puisque les artistes de la communauté deviennent les protagonistes de leur propre histoire. Korimakao introduit au sein des communautés de la péninsule de Zapata un art novateur et d’avant-garde qui a pour but de libérer le spectateur sur le plan spirituel.
Selon les connaisseurs de l’endroit, auparavant, les habitants de Palpite n’avaient d’autre distraction que d’assister aux répétitions de Manuel Porto. Ils se mettaient sur leur trente et un, comme pour se rendre au théâtre. Pour eux, il s’agissait de tout un rituel ou d’un espace culturel permanent.
Dans cette municipalité, il n’y a jamais eu de théâtre en cinquante-six ans. Ce projet a contribué à élever le niveau artistique et esthétique des habitants de la Ciénaga de Zapata. Chaque année, ils sont mieux à même d'apprécier le théâtre, la danse et la musique. L'établissement de ce groupe artistique est devenu une source d’emplois pour les habitants de la Ciénaga et a contribué à augmenter les revenus des restaurants et des hôtels de la région grâce à la visite de personnes venues de l'étranger.
Alicia Beneito
Cubanía
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